en écoutant les symphonies de Brahms, on peut avoir l’impression d’entendre un immense orchestre. Cependant, en examinant la partition, il est surprenant de constater que la taille réelle de l’orchestre est beaucoup plus petite qu’on ne l’imaginait!
« Brahms est allé à l’encontre de toutes les traditions de son temps, explique le musicologue André Lischke. Il rejetait les ballonnements spectaculaires et musicaux de Wagner et de Bruckner., De même, il refusa de suivre les traces de la musique illustrative, que ce soit dans l’opéra ou le poème symphonique. »Il cherchait plutôt à développer une musique « pure », autosuffisante.,
la première symphonie, vingt ans de création
chaque compositeur a caché dans ses archives une symphonie composée au début de sa carrière, peut-être sans aucun intérêt musical ou, inversement, potentiellement prometteuse dans ses idées. Quoi qu’il en soit, ces croquis sont rarement achevés. Pour Johannes Brahms, ce n’était pas le cas: lorsque sa Symphonie no.,1 a été créé le 4 novembre 1876, le compositeur était…44 ans!
le travail a duré près de vingt ans. Brahms compose les premières notes en 1854, à la suite de sa rencontre avec Robert et Clara Schumann. Cependant, à la fois fasciné et terrifié par le genre symphonique, il met rapidement l’œuvre de côté.
« Brahms n’était pas un symphoniste par nature », note André Lischke. Il est venu après Beethoven et Schumann, et était donc naturellement plutôt inquiet. »Pour se rassurer, il a systématiquement interprété chacune de ses symphonies au piano en avant-première à ses amis les plus proches.,
En 1873, le succès de ses Variations sur un thème de Haydn, pour orchestre apporté le compositeur d’un nouvel élan d’encouragement. Brahms a déterré ses vieux croquis et a timidement continué ce qu’il avait commencé des années auparavant. « Schumann souhaitait que L’œuvre ait été composée par Brahms à l’âge de vingt ans, tous ses amis l’attendaient depuis des décennies, nous espérions toujours la voir terminée pour la saison suivante », écrit le biographe de Brahms, Claude Rostand.
Les critiques ont souvent comparé la première symphonie de Brahms à celles de Beethoven; certains l’ont même surnommée la « 10e Symphonie »!,
tous les regards tournés vers Vienne avec la Symphonie no 2
Pour La Symphonie no 2, Il n’y avait pas de temps à perdre! Bien préparé cette fois-ci, Brahms n’a pas perdu de temps et a terminé l’œuvre dans la foulée de sa première symphonie. Il passe l’été 1877 à composer et à vivre confortablement dans la ville autrichienne de Pörtschach, au bord du lac Wörthersee.
L’œuvre a été jouée pour la première fois seulement quelques mois plus tard, le 30 décembre 1877 à Vienne., Bien que le public soit loin d’être réceptif à sa première symphonie en Ut Mineur, la Deuxième Symphonie en Ré Majeur l’emporte avec enthousiasme. Loin des lamentations et des tonalités austères de la première symphonie, la seconde introduit un caractère plus pastoral, frais, champêtre et enchanteur.
Brahms lui-même considérait l’œuvre comme joyeuse et pleine de légèreté: « une Petite Symphonie gay, complètement innocente », écrit-il à Adolf Schübring., La douceur de L’Adagio a séduit même les cœurs les plus froids, et L’Allegretto grazioso ludique et populaire évoque une atmosphère pastorale paisible…
la Troisième Symphonie, « malheureusement trop célèbre »
seule production de 1883, Claude Rostand explique que L’œuvre était attendue avec un tel empressement que les institutions musicales se sont battues frénétiquement pour avoir l’occasion d’accueillir sa première représentation. Sans surprise, l’œuvre fut jouée dans la grande salle de concert de L’Orchestre Philharmonique de Vienne le 2 décembre 1883, sous des applaudissements nourris., Le triomphe de la Symphonie en Fa Majeur se répandit dans toute l’Europe, traversant même l’Atlantique pour se frayer un chemin à travers L’Amérique.
qualifiée d ‘ « héroïque » par Hans Richter, la tonalité confiante, vive et joyeuse de L’œuvre a attiré des comparaisons évidentes avec la Symphonie No 3 de Beethoven, connue sous le nom d ‘ « Eroica ».
la vague de louanges des critiques était si excessive que Brahms s’irrita rapidement du succès de l’œuvre! Regrettable quand on se souvient des doutes et des appréhensions qui surmonteraient Brahms lors de la présentation d’une nouvelle symphonie., Malheureusement, l’œuvre était « trop célèbre », a affirmé le compositeur en remarquant que sa dernière symphonie éclipsait ses œuvres précédentes. Ironiquement, c’est aujourd’hui la moins jouée de ses quatre symphonies…
la présence de Bach se fait sentir tout au long de la quatrième
durant l’été 1885, Brahms séjourne en Autriche, dans la ville de Mürzzuschlag. Là, il a passé de nombreux moments agréables avec ses amis, les Fellingers, son temps passé à composer, à jouer à des jeux et à faire des promenades solitaires à la campagne.,
selon Claude Rostand cependant, au retour d’une longue marche, Brahms a découvert sa maison en feu. Sans Mme Fellinger, la très populaire Symphonie no 4 serait partie en fumée et n’aurait jamais été entendue!
de caractère élégiaque, l’œuvre marque un retour aux formes classiques plus traditionnelles., Le mouvement final en particulier, inspiré des œuvres de Bach, prend la forme d’une chaconne, une danse populaire des XVIIe et XVIIIe siècles basée sur une série de thèmes et de variations (pas moins de 35 dans ce cas!)
pour la première fois, Brahms lui-même était à la tête de l’orchestre pour la première représentation de la symphonie, fin octobre 1885 à Meiningen. L’exécution la plus réussie de L’œuvre a eu lieu à Leipzig, où le compositeur a été rappelé d’innombrables fois, avec de fervents applaudissements… « C’était de la folie », se souvient Claude Rostand.
par Nathalie Moller
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